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Exercices

Exercices au sol

 

Démonstration de contrôles et de capacité d’enchaînement

Au travers de l’exécution enchaînée de diverses techniques recensées sous les termes “contrôle du corps”, “contrôle d’articulation” et “contrôle du cou”, c’est le concept de contrôle qu’il s’agit d’appliquer et de démontrer. Les contrôles ne sont que des applications précises, ponctuelles, du contrôle. En ce qui concerne Tori, le contrôle consiste à exercer et maintenir un ascendant sur Uke. Cet ascendant, plutôt que de passer par l’exercice d’une force supérieure, se caractérise par une légère avance sur les actions d’Uke, par un degré d’initiative supplémentaire sur lui.

  • Le contrôle s’exerce sur soi et non sur le partenaire. Il consiste en un travail de concentration de (et sur) son propre corps, qui en vient à concerner le partenaire par l’usage des points de contact établis avec lui.
  • Une part essentielle du contrôle consiste donc à établir un lien avec le partenaire.
  • Il ne s’agit pas de se servir de ses membres pour maintenir le partenaire dans une position donnée, mais de veiller à relier ses membres à son ventre, et de pousser son ventre vers le sol (puisque la direction de l’efficacité en ju no michi est vers le bas). Le partenaire est inscrit dans ce mouvement, et s’en trouve réellement contrôlé.
  • Il convient de ne prendre aucun appui à l’extérieur de soi, ni sur le sol par l’intermédiaire des coudes ou des pieds, ni sur son partenaire : utiliser la saisie pour hisser son corps, pour le maintenir en suspend par rapport au corps du partenaire.
  • Il en va de même pour les autres familles de contrôles : contrôle d’articulation et contrôle du cou. Il ne s’agit pas là non plus de s’obstiner sur un objectif fixe, extérieur et définitif (étrangler son partenaire ou lui casser un bras).
  • Ce qu’il y a entre deux techniques de contrôle (par exemple entre kuzure geza gatame et yoko shio gatame) c'est aussi du contrôle.

Démonstration d’un randori à thème : contrôles et sorties sur les gesa gatame

Le randori à thème est l’occasion de vérifier que le contrôle ne désigne pas seulement l’action de l’un des deux partenaires, mais bien l’action des deux : contrôler c’est aussi bien maintenir le partenaire que sortir d’un maintien.

  • Sortir d’un gesa gatame revient donc au même que d’exercer un gesa gatame.
  • Les gesa gatame sont des techniques de contrôle dont la direction s’inscrit dans la diagonale du corps du partenaire.
  • Toutefois, l’indice de cette direction est à trouver sur soi. C’est notre propre judogi qui donne l’orientation du contrôle. La direction du contrôle suit la ligne définie par le pan extérieur de notre veste (le nœud de notre ceinture, qui maintient la totalité de la veste, indique quant à lui le lieu autour duquel se concentrent et rayonnent les actions du corps).
  • La sortie de gesa gatame doit elle aussi respecter cette direction. En utilisant les points d’appui pris sur le partenaire, non pour repousser ce dernier mais pour hisser son propre corps, on suit d’abord le mouvement imprimé par le contrôle du partenaire, pour être finalement capable de le porter plus loin, en une situation où celui-ci perd l’initiative et doit céder son ascendant.
  • On ne peut donc pas sortir si l’on s’oppose à la direction prise par le partenaire. Il faut aller avec elle, reprendre l’initiative de la direction à l’intérieur d’un cercle.
  • L’attitude des pratiquants dans l’exercice du randori à thème doit être fluide, disponible, sans verser dans la convention. Ce dernier point exige une vigilance particulière. Les partenaires doivent rester sincères dans leur contrôle sans pour autant rendre impossible la sortie à celui qui est en dessous.

Démonstration du randori

Le travail libre du randori exige de passer d’un contrôle du corps à un contrôle d’articulation, aussi bien qu’à un contrôle du cou. Il est important d’y travailler la continuité de ses actions, de passer d’un contrôle à un autre sans rupture ni temps d’arrêt. Et au cours de ces passages, même si le partenaire vient à prendre l’avantage, il est important de poursuivre encore l’action engagée et de se retenir d’avoir recours à des moyens extérieurs (points d’appuis au sol, blocage,…). Ainsi l’initiative passe d’un pratiquant à un autre, mais à aucun moment l’un ou l’autre ne perd le contrôle.

  • Dans le randori est laissée aux deux combattants l’appréciation de l’intensité de contrôle qu’ils vont exécuter. Il est indispensable d’être capable de varier cette intensité. Varier entre un contrôle intense et un contrôle plus doux permet au randori d’être plus riche, aux techniques d’être plus nombreuses, et finalement de laisser place à une prise de risque mutuelle.
  • Si le randori vient à se fermer et à ne plus témoigner aucune disponibilité, l’un des deux partenaires doit savoir donner à son contrôle moins d’intensité (jusqu’à accorder éventuellement à l’autre une sortie), et permettre à la rencontre de retrouver spontanéité et efficacité.

Exercices debout

Exécution de techniques avec les deux pieds de Uke sur la même ligne

Exécuter une technique à l’arrêt exige de la part de Tori, de réussir à transmettre à Uke sa mobilité sans compter sur les déplacements. Tout est plus court et c’est dans cet exercice particulièrement que l’on vérifie que bouger ce n’est pas être mobile.

  • ATTITUDE. La première chose, face au partenaire, est de travailler son attitude : épaules et pectoraux bas et relâchés, dont le poids repose sur le ventre ; nuque tendue comme pour étirer sa colonne vertébrale en forme d’arc ; poids du corps sur les orteils sans pour autant décoller les talons ; pieds parallèles écartés de la largeur des épaules. Cette position permet une concentration du corps dans le ventre et permet de démarrer et lancer tout de suite son corps par ce point-là.
  • SAISIE. Le kumikata doit être souple au niveau des bras, mais ferme au niveau des mains. Le kumikata doit prolonger l’attitude, il doit permettre de tenir notre corps en avant, en suspend, plutôt que de le laisser reposer sur les talons. Dès que les partenaires se saisissent, et par la façon qu’ils ont de le faire, un espace est créé entre eux deux. Cette séparation des partenaires est la condition de leur rapport, du combat qu’ils s’engagent à livrer. La séparation pose l’enjeu de leur rencontre. Désormais quelque chose doit arriver.
  • CONDITION. L’objectif de la projection n’est pas, pour les partenaires, d’en finir avec le rapport établi par la saisie. C’est pourquoi il est essentiel, tout au long de l’exécution d’une technique, de conserver entre eux une distance. L’espace entre les corps n’est pas destiné à être comblé par l’un des corps, par l’avancée d’une hanche, d’un bras ou d’une jambe. Ainsi, Tori ne dirige pas son action droit vers Uke. Il lance son corps devant le corps de Uke, ou sur son côté.
  • PROJECTION. Dès que le ventre imprime un mouvement, les mains le transmettent au partenaire. Pour toutes les techniques, il convient de ne pas se focaliser sur l’usage des bras ou des jambes, mais de mobiliser le corps et laisser bras et jambes accompagner le mouvement sans volonté propre. Les mains et les pieds sont au service du corps. Ils sont des points d’appuis qui permettent au corps de se lancer avec efficacité.

Exécution de technique en déplacement

  • Un déplacement, tout comme une projection à partir d’une position arrêtée, doit être une action de tout le corps. Le déplacement part du ventre. Les jambes suivent après. Les pieds doivent toujours rester en arrière, ainsi ils sont en poussée. Si les pas sont trop grands, les pieds ne peuvent plus exercer qu’une traction, et le corps que de rester en arrière, sans plus aucune efficacité. Aucun pas ne doit être définitif, on ne doit pas entendre le son d’un pied arriver en opposition avec le sol. Le déplacement doit être fluide, il s’agit de glisser plutôt que de marcher. C’est l’ensemble de ces éléments qui permet à tout moment de modifier sa direction, sa vitesse, d’engager une projection ou d’absorber l’action de son partenaire.
  • Lorsque Tori prend l’initiative d’un déplacement, il doit inciter son partenaire à le suivre. Pour ça, il est essentiel que son action soit sincère, qu’il y engage franchement son corps sans chercher à préserver une sécurité. Si c’est avec la force des bras que Tori essaie d’emmener son partenaire, ce dernier fera preuve — même malgré lui — de réticence.
  • Dans le cas où c’est Uke qui est à l’origine du déplacement, Tori ne s’oppose pas à lui pour autant. Il respecte la direction prise et inscrit sa technique dans cette direction. Il y va du minimum d’énergie pour le maximum d’efficacité : on ne peut pas prendre une direction et projeter dans une autre sans faillir à ce principe.

Morote seoi nage, harai goshi, okuri ashi barai

Les techniques en barai sont sans doute les plus évidentes quant à la nécessité de préserver entre les partenaires un espace, de projeter avec le moins de contact ou de frottement possible. Elles sont en cela un guide pour toutes les autres techniques.

Les techniques en seoi nage sont plus dangereuses. Parce qu’elles nécessitent d’entrer dans une forte proximité avec le corps du partenaire, il est plus tentant d’aller à la rencontre de celui-ci, d’aller un peu plus loin et de finir par le charger sur son dos. Le risque d’opposition est important. Si les techniques en barai sont un rappel de l’espace à conserver entre les partenaires, les techniques en seoi nage indiquent que c’est cependant au plus près du contact qu’il faut conserver cette séparation.

  • ORIENTATION. Pour projeter son partenaire, il faut lui permettre de s’orienter vers l’endroit où la chute va se produire. Cette ouverture qui lui est donnée est produite par une orientation de notre propre corps.
  • DIRECTION. Quelle que soit la technique, la direction de projection est du haut vers le bas. C’est le seul moyen de prendre en compte (c’est-à-dire de ne pas s’y opposer) l’élément incontournable qu’est la gravité. Or, nous savons l’importance qu’il y a à conserver également son corps en poussée vers l’avant. Pour garder son corps en avant tout en se dirigeant vers le bas, il n’y a donc pas d’autre solution que d’inscrire sa technique à l’intérieur d’un cercle.
  • CONTINUATION. La technique s’exécutant dans un mouvement circulaire, il ne lui est pas désigné un point final. Même l’arrivée du partenaire au sol ne constitue pas une fin. Tori, dans sa projection, vise plus loin. À aucun moment il ne doit avoir l’idée d’interrompre son action. Pour autant, le cercle doit rester très court, moins il a d’amplitude plus la technique est puissante. L’exemple pourrait être celui du fouet : lancer là-bas pour revenir ici.

Exécution de uchi komi

Exécuter uchi komi c’est répéter à de nombreuses reprises une même technique. C’est se concentrer totalement sur son exécution, être entièrement dans ce que nous sommes en train de faire, être dans cette répétition. Ainsi se modèle un corps malgré nous : une forme de corps.

  • Les répétitions permettent de corriger à mesure les défauts techniques qui apparaissent. Il s’agit donc de se reprendre et s’améliorer peu à peu, à chaque reprise, mais en cours de route, sans interruption, de manière à conserver un travail continu, régulier, progressif.
  • Il n’est pas indispensable que l’exercice soit exécuté avec vitesse, ni dans l’accomplissement de la technique ni dans sa reprise.
  • L’exercice exige particulièrement de Uke une attitude juste. Il est impossible pour Tori de faire uchi komi avec un partenaire qui ne participe pas. Uke doit être actif autant que Tori, il doit connaître le mouvement qu’est en train d’exécuter Tori. C’est cette connaissance du parcours de la technique par Uke qui permet à celui-ci de donner à Tori, à chaque répétition, la bonne direction de son action. Par l’attitude et le contrôle, sans utiliser la parole, Uke peut aider Tori à corriger ses défauts. Il peut passer d’un contrôle où il fait quasiment le mouvement pour Tori, lui donnant entièrement la sensation du parcours, à un contrôle plus intense qui va montrer à Tori les points d’opposition ou de blocage qui subsistent dans l’exécution de sa technique.
  • Ce faisant, Uke ne travaille pas uniquement au mouvement de Tori, il travaille aussi son contrôle, sa disponibilité face à une attaque, sa capacité à l’absorber et finalement sa capacité à attaquer lui-même.

Exécution d’un randori à thème, capacité d’enchaînement

Il est indispensable de ne pas entendre l’enchaînement de deux techniques comme une stratégie visant à tendre un piège (une fausse attaque) à son partenaire pour mieux le projeter ensuite (à l’aide cette fois d’une attaque véritable) ; mais d’entendre l’enchaînement comme un moyen, pour celui qui attaque, de poursuivre, en la transformant, une action que son partenaire aurait commencée à contrôler efficacement. Une autre façon de comprendre l’enchaînement consiste à le concevoir comme une confusion apportée à son partenaire sur une première attaque, qui finalement se continuerait et se clarifierait en une seconde. Cette confusion bien comprise n’est pas une stratégie, en ce sens qu’elle n’est pas le fruit d’une préméditation. La confusion est réalisée dans l’instant, dans le temps de l’action. Il est plus juste, ainsi, de l’entendre comme une confusion faite à soi-même, comme une manière de se “divertir” de soi pour être plus disponible à la situation. Cela consiste en définitive à réaliser une technique en pensant à une autre. À penser, par exemple, okuri ashi barai et à réaliser finalement harai goshi, à penser hane goshi à droite et à finir par passer sasae tsuri komi goshi à gauche. C’est le moyen de retrouver de la spontanéité malgré la connaissance finie, limitée, que l’on a de ses techniques.

  • Plusieurs types d’enchaînement sont possibles, mais tous doivent être initiés par une première attaque véritablement sincère. Cette condition détermine l’engagement du corps sur la seconde attaque. S’il n’est exécuté d’abord qu’une fausse attaque, la seconde a très peu de chances d’être authentique et de parvenir à une quelconque efficacité.
  • L’exercice d’enchaînement exige d’exercer un bon contrôle à l’aide d’un bon kumikata. C’est le contrôle qui permet d’enchaîner deux techniques avec continuité. Sans quoi une première action trop distincte viendrait faire surgir chez le partenaire une réaction. Or, il n’est pas question d’action-réaction, l’enchaînement doit se faire dans l’action uniquement, et en un seul temps, quitte à ce que ce temps soit plus long que pour l’exécution d’une technique simple.

Exécution d’un randori

Faire randori est le moment de mettre en application, dans le cadre d’un combat, des techniques qui ont été étudiées dans le cours. Il s’avère l’un des exercices les plus gratifiants de la pratique. Il est l’occasion de vérifier avec enthousiasme l’efficacité des techniques abordées plus studieusement par ailleurs. Encore faut-il que le randori, pour avoir une valeur, soit réalisé avec justesse, et, pour commencer, qu’il ne soit confondu ni avec le test d’efficacité, ni avec le nage komi, ni avec yaku suku geko.

Il n’est plus question, au cours du randori, des positions “Tori” et “Uke” définies à l’avance. Les deux partenaires sont libres de prendre tour à tour les initiatives que dicte l’action. Il y va de ce que l’on pourrait appeler un dialogue. Le temps du randori est le temps — court — de la rencontre avec son partenaire. Un temps au cours duquel il s’agit de construire un rapport éphémère, mais entier et sincère. Nul temps pour rester observateur ou distant, il faut saisir les opportunités qui se présentent, y répondre aussitôt, relancer sans cesse…

Le randori est un moment de grande ouverture qui exige à ceux qui s’y livrent de prendre des risques. C’est là le seul moyen de trouver par soi-même des opportunités nouvelles. Cette ouverture permet aux deux partenaires d’acquérir des sensations : réussir à projeter ou se faire projeter dans un randori, sans s’être opposé ni pour autant tomber délibérément, est une grande source de progrès mutuels.

Exécution des 2ème et 5ème série du nage no kata,

de la série de contrôles d’articulations du katame no kata,

du kime no kata en tant que Uke,

des trois premières techniques des go no sen et ju no kata.

Le kata est un exercice qui permet de porter toute son attention sur le respect des principes qui fondent la pratique du ju no michi. À l’inverse du randori, la succession des formes à exécuter dans le kata est déjà donnée, et ne constitue donc pas de souci particulier. La clarté avec laquelle les rôles de Tori et de Uke sont établis, la précision de la succession des techniques, l’élaboration globale de l’exercice aident à la concentration que doivent porter les judoka sur la sincérité de l’exécution, sur la justesse de l’interprétation, et sur la recherche à mener pour approcher la vérité de la pratique.

On doit concevoir le kata non comme une compilation de techniques à réaliser les unes après les autres, mais comme un exercice à accomplir dans sa totalité. Au-delà de la multiplicité des éléments qu’apporte un kata, c’est dans sa complétude qu’il recèle le meilleur de sa valeur éducative. Le kata est comme une énigme dont, depuis le début, la solution serait connue. Le travail du kata consiste à rassembler ses éléments en apparence épars, à leur donner cohérence et hiérarchie pour les représenter sous la forme d’un corps unifié. C’est en passant au travers du corps du kata que le pratiquant conforme son propre corps.

  • NON-OPPOSITION. Tout ce qui est fermé, dur, raide, agressif, tout ce qui concourre à l’opposition des partenaires leur interdit de développer correctement leurs techniques. Au cours du kata, ce n’est pas une confrontation frontale qui se joue entre Tori et Uke, mais un combat où l’un et l’autre cherchent à éviter le rapport de force, la ligne droite. Pour rendre son action plus efficace, Tori choisit toujours de passer à côté ou autour de Uke. Le kata offre un cadre particulièrement favorable à la compréhension et au travail de la non-opposition. La convention mutuelle que concluent Tori et Uke en ouvrant un kata, les libère des risques d’opposition liés à la part d’improvisation de la pratique. Dans le kata, nulle surprise : Uke va lancer des attaques que Tori connaît, et auxquelles il va répondre d’une manière que Uke n’ignore pas. Le risque d’opposition qui subsiste dans le kata est réduit, débarrassé de ses aspects circonstanciels (l’énergie déployée par le randori, les effets des déplacements libres, les passions révélées au cours du test d’efficacité, etc.), il reste donc à Tori et Uke de travailler à éliminer l’opposition qui revient à chacun. Ils doivent chercher à ouvrir, être disponibles, souples, à développer leurs actions sans aller à l’encontre l’un de l’autre.
  • ESQUIVE. Il faut avoir de l’esquive avant même la saisie du kumikata, pour donner tout de suite l’orientation de la chute et de l’endroit où Uke va être amené. Dès le départ d’une action, l’esquive en indique la fin. C’est par là qu’elle participe elle aussi de l’exécution du kata en un seul temps. Elle doit être maintenue tout le long du kata. Grâce à elle, les actions, les techniques sont très courtes : de légères orientations du corps remplacent des déplacements amples. L’esquive permet de ne pas passer par des situations de repli, de fuite momentanée ou par des prises d’appel, mais bien au contraire d’aller toujours de l’avant, au cœur de la situation, par son chemin le plus court. Esquiver c’est faire face, prendre sur soi le danger que représente le partenaire. L’esquive c’est prendre le risque de mourir, en quoi elle est garante de la sincérité des pratiquants.
  • DECISION. La décision est le garant de l’enjeu de vie et de mort que les kata, tous à leur manière, représentent comme étant l’enjeu d’une rencontre en ju no michi. Elle est marquée dès le salut par la manière d’incliner son corps avec détermination, ce qui préfigure déjà la décision à tenir durant les projections et les contrôles du partenaire. S’exercer à exécuter les diverses techniques d’un kata, et au-delà le kata dans son ensemble, en un seul temps, c’est s’exercer à développer la décision. Exécuter en un seul temps, c’est exercer le tranchant décisif que réclame le combat qu’est le kata.
  • CONTROLE. Toutes les circonstances du kata exigent d’avoir le contrôle, aussi bien face au partenaire qu’à distance de lui, ou qu’au moment de lui tourner le dos. Le lien doit être permanent, par le regard, par l’attitude, par la manière de saisir son partenaire. Il en va de même bien sûr dans les déplacements avec son partenaire et dans le lien que l’on a avec lui au sol. Dans la projection, il faut pouvoir contrôler son propre corps pour pouvoir retenir Uke dans sa chute. Dans les contrôles d’articulation ou de cou, il faut être capable de ne pas blesser son partenaire, tout en le maintenant dans une situation où il n’a plus de possibilité d’initiative efficace. C’est une façon de maintenir Uke dans une situation de danger permanent. Le travail de Tori est d’amener Uke au plus proche d’un point de rupture, et de le montrer (à Uke lui-même comme à ceux qui assistent à la démonstration). C’est le contrôle qui permet de franchir, dans un sens ou dans l’autre, la ligne entre la vie et la mort tracée par la décision. Dans la pratique du ju no michi, qui engage à un rapport sincère au risque du danger, le travail du contrôle est l’élément par lequel on acquière la capacité de ne tuer ni de blesser son partenaire. C’est en bonne partie le contrôle qui permet au ju no michi de n’être pas une pratique martiale, mais une discipline de combat assumant une dimension symbolique.
  • MOBILITE. C’est la mobilité de Tori qui anime Uke. Chaque kata débute par une action, un pas ou une attitude de Tori qui témoigne de sa mobilité et provoque celle de Uke, qui l’incite à se mettre en mouvement et à attaquer. Sans mobilité, il n’y a pas de combat réel, il n’y a donc pas non plus de kata. La mobilité assure au kata de ne pas être une succession de gestes protocolaires. Bien au contraire, elle insuffle à la forme que sont les kata un mouvement, qui est au cœur de la pratique du ju no michi. Mouvement infime, souvent invisible à l’œil, mais dont témoigne l’enthousiasme, l’élan contenu, de deux partenaires qui accomplissent un kata avec mobilité.

Qu’est-ce que la fraternité du ju no michi ?

Le ju no michi est une pratique qui tend à rassembler des individus en vue de leur éducation non seulement commune (les uns avec les autres) mais mutuelle (les uns pour les autres). Au travers de rapports sincères, exempts de peur, de lâcheté, de bassesse, elle engage ses pratiquants à un travail vers un but commun. Et mieux encore : à un amour de ce travail. C’est à l’ensemble de ces éléments que l’on reconnaît en elle l’expression d’une fraternité.

Rudolf di Stéfano, Juin 2003